jeudi 1 juillet 2010

Paris

Je ne suis pas la première à dire : Ah, Paris !
Quelle belle ville... je l'adore.
Je reviens du Marché de la poésie de Paris, qui a eu lieu du 17 au 20 juin à la Place Saint-Sulpice, juste devant la belle église du même nom. Un grand nombre de stands se tenaient là, malgré le froid, la pluie, le vent... aïe! Beaucoup de poètes étaient présents. De belles rencontres.
J'ai profité de mon passage à Paris pour participer au projet sur la condition féminine de Marie-Hélène Le Ny. Elle rencontre des femmes, de différents horizons, fait un portrait, et enregistre leur lecture d'un texte qui les a marquées comme femmes. Sans être nécessairement féministe, ce projet se veut une façon de donner la parole aux femmes. On sait qu'encore aujourd'hui, elles n'ont pas cette liberté partout...
J'ai donc été dans l'atelier de Marie-Hélène Le Ny, et j'y ai lu le poème Adolescence, de Geneviève Amyot, qui chaque fois que je le lis m'émeut.
Je vous laisse d'ailleurs le lien vers le blog du projet :
http://femmesenmouvement.over-blog.com


Adolescence


Dans cet espace que tu as établi
désormais entre nos corps
Je me tiens
Je voyage

De la rigueur de tes ruptures
à l'inévitable de ma perte
je voyage

De tes désirs à mon inquiétude
De tes silences à ma nostalgie
De ta porte close à mes bras vidés

Je t'en prie

Laisse-moi t'aimer encore
comme on aime une petite fille
Encore un peu
Parfois

Dans la persistance heureuse
de nos complicités matrices
je voyage

Tu es belle je suis fatiguée
Pourtant encore si vive je me tiens

Ma jeunesse n'est pas perdue
puisqu'elle est en toi

De tes chants à ma joie je voyage
De tes sarcasme à mes fureurs
De ton amour troublé à mon amour
en désarroi

Ta jeunesse est une pudeur extrême
que je contemple du bout des cils

Tu te caches parchemin précieux
dans la nécessité de ton urne propre

Je me tiens
Sentinelle fragile
Ignorante
Ridée

De la splendeur de tes mouvances
à la ténacité de mes pertes je voyage

De mon enfance saccadée à la tienne
en miracle incomplet

De ta colère de mal entendue
à ma honte de répudiée

De mon sang qui s'en va
à ton sang qui s'en vient
Et je le bénirai
Que tu m'en montres ou non la couleur
je le bénirai
Ton premier livre t'en souviens-tu
C'était Une toute petite dame

Tu seras la première
La toute première dame
Je te bénirai
Puisque nous ne nous berçons plus

De tes danses à mon pas
je voyage
De tes grandeurs à mes gloires
De tes conjugaisons à mes poèmes
De mes espoirs à tes rêves

En cette nouvelle face pour l'amour
Méconnaissable de toute évidence
Dans le nécessité aveugle de l'arrachement
Dans le dur contentement du don
Je me tiens
Sentinelle forte
Fière
Fervente je me tiens
Je voyage
Silencieuse
Au plus ultime de tes feux


Toute l'oeuvre poétique de Geneviève Amyot est disponible aux Éditions du Noroît.
http://www.lenoroit.com/

5 commentaires:

  1. Merci de partager ce magnifique poème. Merci pour l'apesanteur.

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  2. En effet, ce poème est particulièrement touchant. Chaque fois que je le lis, je suis émue. Chaque fois ! D'ailleurs, j'ai découvert l'oeuvre de Geneviève Amyot qui est intelligente, touchante, et surtout, d'une profondeur ! et en même temps, d'une accessibilité certaines.

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  3. Je passe par hasard et en lisant ce poème j'ai tout à coup l'impression d'avoir "voyagé" et d'atterrir doucement comme un avion de papier. Quelle calme tout à coup ! Superbe !

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  4. Oui, ce poème est superbe. À faire découvrir !

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